Le mardi 30 août, le flic Miguel Millacura Carcamo qui a tiré sur Manuel Gutiérrez Reinoso de 16 ans, a été inculpé, accusé d’ «assassinat». Il se trouve actuellement en détention provisoire dans la caserne de la communauté Pudahuel, un centre de détention spécial pour la protection des ex-policiers. Bientôt, il sera déterminé si un tribunal civil ou militaire décidera de la sentence pour le meurtre.
L’état chilien, par son gouvernement de marionnette, a commencé de «laver» son image publique en punissant «gravement» les Carabiniers directement impliqués dans l’assassinat de l’adolescent, mais aussi leurs supérieurs˙ il présente ainsi une mesure exemplaire à toute la société, dans un effort d’éviter d’accepter les responsabilités assumées par le Ministère de l’Intérieur.
Dans la nuit du 24 août, une jeune fille de 18 ans a été grièvement blessée par balle par la police alors qu’elle courait pour éviter d’être arrêtée. Mais cela n’était toujours pas suffisant. La police était en quête de vengeance pour un total de 156 flics blessés dans tout le pays, durant les manifs du 24 et 25 août.
Dans la nuit du jeudi 25 août, au milieu de violents affrontements dans le quartier de Santiago, Pincoya, Mario Pinto Parraguéz de 18 ans, a reçu une balle en plein visage et a été transféré dans l’hôpital. Son état s’est détérioré jusqu’à sa mort, le lundi 29 août.
Mario s’est retrouvé dans la ligne de tir, entre la police armée et les manifestants. En l’absence d’une vision solide sur les faits (contrairement à ce qui s’est passé dans la communauté de Macul suite à la mort de Manuel), le siège de la police et les médias corporatistes promeuvent un scénario selon lequel Mario a été abattu par un trafiquant de drogue. Tout cela, afin que les Carabiniers ne soient pas considérés responsables de ce meurtre comme ils tirent souvent et sans distinction sur les hommes.
«Le Crépuscule de la Peur», un court documentaire sans commentaire, capte des images de la manifestation pour l’éducation, du 9 août 2011, à Santiago. Ses réalisateurs ont dédié ce témoignage depuis les rues du Chili, à Manuel Gutiérrez Reinoso qui a été assassiné par la police.
Vous pouvez regarder plus de vidéos du groupe anarchiste Sin(Α)psis – Productora de Comunicación Socialici.
Info sur les 48h de grève générale au Chili(en anglais)
Dans la nuit du 25 au 26 août, dans le quartier de Jaime Eyzaguirre où Manuel Gutiérrez Reinoso a été assassiné par la police, ses proches et ses amis ont organisé une cérémonie à sa mémoire et ont défilé dans les rues de la communauté Macul. Des rassemblements et des marches ont eu lieu dans différentes villes du Chili, mais aussi à Buenos Aires en Argentine. Sur l’avenue Alameda dans le centre de Santiago, la police a fait usage de violence après 19h; des canons à eau et des gaz lacrymos ont été utilisés pour disperser la manifestation de plus de 200 personnes. Cinq manifestants ont été arrêtés et les personnes solidaires ont répondu en montant des barricades et en s’affrontant avec les forces répressives.
Le nombre total d’interpellations dans tout le Chili pendant la grève générale de 48h (24-25 août) est de 1,394. Plus de 300 personnes ont eu des poursuites; dans la majorité des cas les charges sont: troubles violents mineurs ou majeures, attaques contre des policiers ou pillage. La plupart des personnes persécutées ont été relâchées sur des conditions restrictives: se présenter régulièrement auprès des autorités, ne pas sortir du territoire et ne pas participer à des manifs. Par ailleurs une vingtaine de manifestants (le nombre n’est pas encore confirmé) ont été accusés de possession d’arme à feu, et certains ont été maintenus en garde à vue.
Durant la manif du jeudi 25 août à Santiago, trois jeunes colombiens ayant jeté des objets sur les carabiniers ont été arrêtés par des agents secrets de la police politique Dipolcar. L’un d’eux a été relâché. Les deux autres jeunes (15 et 20 ans) ont été poursuivis pour troubles publics violents et le procureur a demandé leur expulsion du pays. Celui de 15 ans est un réfugié politique et ne sera pas expulsé mais le colombien de 20 ans est menacé d’expulsion à cause de sa participation aux manifs. Dans le même temps les autorités de la province de Santiago ont déposé des poursuites contre les immigrés arrêtés (à noter que le 19 août à Bogota, en Colombie, un graphiste de 16 ans,Diego Felipe Becerra, a été abattu de sang froid par la police nationale; des marches de protestation ont suivi cet assassinat).
Il est clair que cette répression est une mesure exemplaire contre tous les immigrés vivant au Chili, afin qu’ils sachent ce qu’il peut leur arriver s’ils protestent. Des centaines de milliers d’immigrés sont exploités, vivent dans des maisons bondées, et souffrent des constantes discriminations ainsi que d’une longue liste d’humiliations avec comme seule raison leur provenance d’un autre pays. Ces personnes pourraient à tout moment se révolter contre l’oppression; c’est pourquoi le pouvoir réprime brutalement tous les immigrés qui osent protester. Par le passé, l’état chilien a déporté un grand nombre d’immigrés pour les motifs qu’ils aient participé à des rassemblements ou des manifs, qu’ils aient été solidaires avec les Mapuche, ou encore pour leur proximité avec les groupes de gauche ou anarchistes radicaux.
Aussi le 25 août, un enfant de 12 ans a été touché au visage par un tir d’une grenade lacrymogène pendant une manifestation à Concepción. La joue du garçon a été déformée après ce tir de grenade par un des assassins de la police chilienne, aux alentours de l’université de la ville.
Cela n’est pas quelque chose de nouveau: après la manif pour l’éducation publique du 12 mai, les carabiniers ont violemment envahi l’université de Concepción. L’étudiante Paulina Rubilar a été sauvagement blessée à l’œil par une grenade lacrymogène.
La pratique meurtrière de tirs de lacrymos à bout portant sur des manifestants, ainsi que l’utilisation extensive de balles en caoutchouc et de boulettes en plastique, ont causé des blessures à des centaines de personnes ces derniers mois. Les boulettes en plastique peuvent laisser des séquelles permanentes, voir même être fatales -tel qu’il fut le cas le 27 mars 1984, pendant une manifestation des étudiants de l’époque, quand une étudiante de 24 ans Caupolicán Inostroza Lamas perdit la vie, touché à la gorge par une de ces boulettes tirées par les serviteurs de la dictature de Pinochet.
Néanmoins, il semble que la démocratie bourgeoise transcende la dictature. Il est à noter que des manifestations contre le président milliardaire chilien Sebastián Piñera ont eu lieu dans quasi tous les endroits où il se montre. Son gouvernement essaie de masquer le meurtre de Manuel Gutiérrez Reinoso. Dans le même temps les porte parole de la police nient qu’un flic, un homme de leur nature, tira sur cet enfant et les média corporatistes reproduisent les scénarios aberrants afin de minimiser l’affaire d’assassinat d’état.
Dans une déclaration commune, les résidents du quartier de Jaime Eyzaguirre -où le meurtre de l’adolescent eut lieu- confirment que la police est seule responsable de ce meurtre, comme les témoignages l’indiquent aussi, et notamment celui du frère de 22 ans de Manuel qui était avec lui au moment de l’assassinat. Le quartier tombe sous la juridiction du 43ème département de police de Peñalolén. Dans cette même déclaration, les habitants rapportent qu’un autre voisin a été blessé à l’épaule par un tir de flic. Ce qui est confirmé par un jeune dans la presse du régime. Il ajoute que lorsque la voiture de patrouille est apparue dans la rue Amanda Labarca, les manifestants ont commencé de jeter des piètres et les flics ont ouvert le feu. Cependant, Manuel a été assassiné à environ 70 mètres du lieu des affrontements.